Syndrome Post Polio

Définitions et caractéristiques

Introduction

30 à 40 ans, en moyenne, après l’attaque initiale de polio peuvent apparaître de nouveaux problèmes. Il semblerait, en effet, que  70 % des polios paralytiques et 40 % des non-paralytiques développent un syndrome post-polio (SPP).

Définition

Plusieurs appellations ont été utilisées pour définir le syndrome post-polio : atrophie musculaire post-polio (AMPP), effets tardifs de la polio, séquelles post-polio. Le SPP est un terme plus hétérogène et donc plus pratique au point de vue de la clinique. Il ne doit pourtant pas être utilisé sans discernement pour toute personne ayant un historique de polio paralytique avec de nouvelles plaintes. Les critères de ce diagnostic sont les suivants :

  1. Episode préalable de polio paralytique confirmé par un historique, un examen physique et des conclusions typiques sue électromyogramme (EMG).
  2. Evaluation EMG standard qui montre des changements conséquents.
  3. Période de récupération neurologique suivie d’un intervalle prolongé de stabilité neurologique et fonctionnelle précédant la venue de nouveaux problèmes : l’intervalle de stabilité neurologique et fonctionnelle dure habituellement 20 ans ou plus.
  4. Arrivée progressive ou soudaine d’un nouvel affaiblissement neurogénique, non dû à la mauvaise utilisation des muscles précédemment affectés. De plus, peuvent apparaître une fatigue excessive, une douleur musculaire ou articulaire, une diminution de l’endurance, un abaissement du fonctionnement et une atrophie.
  5. Exclusions de conditions médicales, orthopédiques et neurologiques qui pourraient être la cause des problèmes mentionnés ci-dessus.

D’autres symptômes ne montrent pas l’évidence d’un véritable nouveau dysfonctionnement de l’unité motrice.

Ces symptômes

  1. peuvent être attribués directement au dommage causé par le poliovirus, tel que l’intolérance au froid ou le déséquilibre musculo-squelettique
  2. sont supposés être reliés à l’impossibilité du corps à maintenir le niveau de récupération qui a été obtenu, un nouvel affaiblissement peut alors apparaître
  3. proviennent de traumatismes secondaires (syndrome du canal carpien, arthrose, etc.).

Pathophysiologie de la poliomyélite

Elle est nécessaire à la compréhension des causes possibles du syndrome post-polio ainsi qu’à l’élaboration de son traitement.

A) Processus de récupération après la poliomyélite aiguë

Après l’invasion du SNC par le poliovirus, on assiste à une perte neurologique et fonctionnelle due à l’atteinte des cellules de la corne antérieure qui laissent les fibres musculaires qu’elles innervaient orphelines. La récupération atteint un plateau en 6 à 8 mois. L’étendue de la récupération neurologique et fonctionnelle est déterminée par trois facteurs majeurs :

La récupération des motoneurones atteints de manière temporaire et la poursuite de leur activité normale.
L’augmentation de taille (hypertrophie musculaire) des fibres musculaires innervées par les cellules nerveuses survivantes et leur renforcement grâce à des exercices de renforcement traditionnels.
Le nombre de neurones moteurs qui développent des bourgeons axones terminaux pour ré innerver les fibres musculaires laissées orphelines par la mort de leur neurone moteur original.

Le phénomène de bourgeonnement axone terminal rend possible l’adoption des fibres musculaires orphelines par un neurone moteur sain ou récupéré. Une cellule de neurone moteur peut adopter 5 à 7 fibres musculaires additionnelles, jusqu’à 20 pour chaque cellule musculaire innervée originellement. On peut donc en conclure qu’un neurone moteur qui innervait à l’origine 100 fibres musculaires peut innerver 700 à 2000 fibres. Il en résulte que les anciens patients atteints de polio peuvent conserver quelques unités motrices agrandies qui sont capables de faire le travail préalablement effectué par beaucoup d’unités. De plus, les fibres musculaires restantes s’hypertrophient pour augmenter la résistance du groupe musculaire. Grâce à ce mécanisme de compensation neurophysiologique, un muscle peut conserver une résistance normale même après que 50 % des neurones moteurs atteints aient été perdus.

B) La période de stabilité :

Elle peut durer plusieurs décennies et est caractérisée par un processus continu de remodelage ainsi qu’une condition neurologique et fonctionnelle stable. On note parfois la mort de quelques terminaisons nerveuses qui sont automatiquement remplacées par la formation de nouvelles terminaisons.

Étiologie du syndrome Post-Polio

Les changements pathologiques occasionnant le syndrome post-polio sont toujours inconnus.

Ces dernières années, plusieurs théories ont été avancées.

– Dysfonctionnement de l’unité motrice dû à un travail excessif ou à un vieillissement prématuré des unités motrices affectées par la polio

Cette hypothèse semble être la plus probable.

D’après des études morphologique, clinique et électromyographique, le SPP serait le résultat d’une instabilité, nouvelle ou peut-être permanente, des unités motrices précédemment touchées par la polio. Il serait causé par une dénervation nouvelle et continue des muscles affectés par la polio mais également de ceux pensés asymptomatiques. En effet, les motoneurones ayant adopté les fibres musculaires laissées orphelines par le poliovirus sont exposés à des demandes métaboliques accrues en raison d’un territoire d’unités motrices accru. Les neurones moteurs géants ne sont pas capables de supporter indéfiniment la demande métabolique de leurs bourgeons et il résulte que les terminaux individuels se détériorent lentement et que les fibres musculaires ré innervées diminuent.

Lors de ces études, il est apparu clairement que, chez les patients présentant le SPP, les neurones moteurs sont instables et subissent constamment une altération ultérieure nécessitant une réparation et une restructuration des unités motrices. On note également une perte continue, mais heureusement lente, de l’ordre de 1% par an, de la force musculaire qui ne peut être expliquée totalement par les modifications normales liées à la sénescence. Cependant, il est évident que ce problème lié au vieillissement des différentes structures du corps entraînera une perte plus importante du nombre de motoneurones et donc de perte de force musculaire d’autant plus grande. En conséquence, le nombre de fibres musculaires conduites par chaque neurone moteur décline et les anciens polios expérimentent un nouvel affaiblissement ainsi que d’autres symptômes de dysfonctionnement neurologique.

fibresmuscul

Légende de l’illustration (de gauche à droite).

La normale : représentation de trois unités motrices normales.

Phase aiguë de la polio ; l’invasion d’un neurone moteur par le poliovirus entraîne la dégénérescence du neurone affecté et la dénervation des fibres musculaires associées.

Guérison : le rétablissement à la suite d’une polio paralytique se produit par le bourgeonnement axonal des neurones moteurs et la ré innervation des fibres musculaires.

Syndrome post-polio : la cause la plus probable du SPP serait la dégénérescence des unités motrices, accompagnées de la dénervation des fibres musculaires.

– Autre étiologies discutées :

D’autres hypothèses ont été proposées pour expliquer le SPP mais non pas été retenues. Ce sont la sur-utilisation musculaire, la non-utilisation musculaire, la prédisposition à la dégénérescence des neurones moteurs due à des dommages gliaux, vasculaires et lymphatiques, la réactivation du virus ou infection permanente, le syndrome immune intermédiaire et l’influence du vieillissement de l’hormone de croissance.

Caractéristique clinique du Syndrome Post-Polio

Ces 10 dernières années, une série d’études a démontré que la majorité des patients post-polios développent des symptômes similaires, dont la fréquence et la place relative sont tirées d’un certain nombre d’études et rassemblées dans le tableau ci-dessous:

symptomes_ postpolio

Le plus souvent, l’arrivée de ces nouveaux symptômes est insidieuse, mais elle peut être précédée par des événements spécifiques tels qu’un accident mineur, une période de repos au lit ou un gain de poids. Il est probable que de nouveaux problèmes puissent surgir quand des problèmes médicaux coexistants, tels que le diabète, se développent ou s’aggravent.

Les facteurs associés au développement de l’affaiblissement progressif sont les suivants :
– âge du patient lord de l’infection initiale : plus de 10 ans
– historique de l’hospitalisation
– utilisation d’un respirateur
– implication paralytique des 4 membres
– un affaiblissement plus important au moment de la polio aiguë
– un plus grand laps de temps depuis l’infection aiguë
– une prise de poids récente
– douleur musculaire associée aux exercices
L’intervalle moyen entre l’épisode initial et l’arrivée des symptômes se situe en moyenne autour de 35 ans.

Caractère morphologiques du syndrome Post-Polio

Suivant une étude menée par Dalakas et al., basée sur une population de 27 post-polios pendant 8 ans, de nouvelles constatations sur le nouvel affaiblissement ont vu le jour. Les conclusions des biopsies comprenaient les changements dans la morphologie cellulaire, les groupements de types de fibres, les petites fibres angulées et l’hypertrophie des muscles qui étaient le moins touchés. Suivant la sévérité de l’implication de la polio, il a placé ces muscles dans quatre sous-groupes:

  1. Le sous-groupe I
    Il comprend les muscles originellement touchés mais ayant partiellement récupéré et présentant un nouvel affaiblissement. Ces muscles montrent :
    – des caractéristiques myopathiques : augmentation du tissu conjonctif; des fibres occasionnelles phagocytées; des variations de dimensions de fibres
    – des changements neurogéniques anciens
    – des changements neurogéniques nouveaux.
  2. Le sous-groupe II
    Il comprend les muscles originellement affectés mais ayant pleinement récupérés, avec un nouvel affaiblissement. Ceux-ci présentaient l’évidence d’une ré innervation extensive avec des répartitions de fibres de taille normale, plus petites et plus angulées.
  3. Le sous-groupe III
    Il inclut les muscles cliniquement épargnés à l’origine mais atteints d’un nouvel affaiblissement. Ces muscles comme ceux du groupe II, montrent une énervation/innervation chronique avec des répartitions types de fibres.
  4. Le sous-groupe IV
    Il contient les muscles asymptomatiques qui présentent une répartition par type de fibres à l’exception de petites fibres angulées et d’évidence d’inflammation.

En conclusion

La nature imprévisible et la grande variabilité avec laquelle la polio affecte les muscles démontrent que deux personnes, voire même deux muscles d’une même personne, ne peuvent être soignés avec un traitement identique. Ceci pose le problème du traitement d’une personne présentant le SPP.

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